J'ai fini!
C’est la dernière fois que j’écris dans cette maison. C’est ici que j’ai appris à écrire. J’avais décoré ma chambre moi-même. Je me souviens de l’odeur de la peinture. Et dans cette pièce que j’aimais, j’écrivais un livre. J’avais collé des post-its sur le mur et des images inspirantes.
Papa fait la vaisselle, Capucine dort et moi je tape à l’ordinateur sur la table de la salle à dîner. Il y a beaucoup de voitures stationnées dans la cour en face. Ils font peut-être un party.
Le soleil se couche bientôt, mais le ciel est bleu. Maman disait qu’il était bleu en Abitibi comme nulle part ailleurs.
Je suis fatigué, j’ai trop bu hier.
Je ne suis pas triste. Je fais le tour de la cour et je vois bien que Maman n’y est plus. Elle n’est plus dans la chambre, elle n’est plus dans la cuisine, ni dans le garage ni dans la bibliothèque.
Je ne sais pas quoi dire. Il y aurait toute la vie de cette femme à raconter dans cette maison, mais je n’écrirai pas ça tout de suite. Le Conseil des arts a dit que c’était trop ambitieux.
Cette maison ne nous appartient plus. C’est pour ça que mon père a choisi de la vendre. La maison a fini, comme quand on crie « J’ai fini ! » après avoir écrit la dernière phrase de son manuscrit.